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L'origami, facteur d'intégration scolaire

31/12/2008

Sireuil (Charente). L'institut médico-éducatif La Liège s'appuie sur l'origami comme support pédagogique innovant, et s'associe à l'école primaire pour créer une activité commune. Quand les usagers se retrouvent réellement acteurs de leur projet...


Video-reportage
IME Foyer de la Liège - Sireuil (Charente)
Lauréat du Trophée Direction(s) 2008.

Comment concilier la prise en compte de l'usager, de son bien-être et de son développement harmonieux, au sens de la loi du 2 janvier 2002, avec les exigences d'accès aux dispositifs de droit commun énoncés par la loi du 11 février 2005? C'est la question que s'est posée l'équipe de l'institut médico-éducatif (IME) La Liège, situé à Sireuil, village charentais à quelques kilomètres d'Angoulême. Et en particulier son directeur, Alain Chauveau, à la tête de la structure depuis fin 2006. « Les enfants qui sont admis à l'IME sont sortis du système scolaire, car ils n'y trouvaient pas leur place, même via les classes d'intégration scolaire ou les unités pédagogiques d'intégration », explique ce dernier.

Les jeunes accueillis dans la structure - agréée pour 60 enfants à partir de 6 ans souffrant de déficiences légères et moyennes - présentent, en outre, de plus en plus de troubles associés qui nécessitent un important travail « d'étayage et de reconstruction ». Les éloignant de la perspective d'intégration à l'école dite ordinaire.

« Or, de façon schématique, la loi du 11 février 2005 vise à (ré)intégrer ces enfants dans un milieu dont ils viennent d'être exclus... Toutefois, une loi n'empêche pas de faire preuve d'imagination! », poursuit Alain Chauveau. Un directeur en quête de sens: « L'important, ce ne sont pas les procédures et les outils législatifs, réglementaires, budgétaires, évaluatifs... que nous devons mettre en œuvre. Ce qui est primordial, c'est de nous poser, régulièrement, la question de la pertinence de ce que nous faisons. »

Savoir-faire

La solution finalement envisagée? La mise en place d'activités communes avec l'école primaire de Sireuil, articulée autour de deux mots clés: non-discrimination et non-stigmatisation. Mais, surtout, autour des savoir-faire des jeunes de l'IME. En l'occurence, la pratique de l'origami, cet art japonais qui permet, à partir d'une simple feuille de papier et d'une succession de plis, de réaliser différents volumes et formes: des célèbres avions et cocottes en papier aux figures beaucoup plus complexes. Une initiative qui valorise les jeunes de l'IME et les positionne comme apprenants et détenteurs de compétences. Et non plus uniquement comme usagers pris en charge dans une structure sociale et médico-sociale... Cette inversion de logique place réellement les jeunes au cœur du projet, dont ils deviennent des acteurs centraux.

La démarche trouve une de ses racines dans le travail mené au sein de l'IME pour faire face à la nécessité de mettre en place les étayages thérapeutiques nécessaires. Ce notamment, via la diversification des supports pédagogiques auxquels les professionnels (enseignants, psychomotricien, psychologue, pédopsychiatre...) ont recours.

Support traditionnel d'expression et de créativité, mais aussi de lien avec l'environnement et le milieu ordinaire: le dessin et la bande dessinée. Ce qui s'explique aussi par la proximité géographique de sa capitale: Angoulême.

Sens artistique

« Mais par ma formation initiale, tournée davantage vers la culture, et mon parcours un peu atypique, j'ai toujours été attaché à développer des supports d'apprentissage différents », explique Alain Chauveau, titulaire du diplôme d'État relatif aux fonctions d'animation, ancien directeur de foyer de jeunes travailleurs, puis d'un établissement et service d'aide par le travail.

Un directeur, artiste peintre à ses heures perdues, qui ne manque pas de sens créatif. Une institutrice (Marianne Fabrer) s'intéressant à l'art et au Japon. Le choix de l'origami comme activité au sein de l'IME est né de cette rencontre. Mais il n'est pas totalement le fruit du hasard pour autant.« Les psychomotriciens peuvent y trouver un exercice pratique de développement et de consolidation des capacités motrices fines. Et les instituteurs, un nouveau support pour les apprentissages de base (trier, sérier...). À partir d'une discipline commune, on crée ainsi du lien entre les professionnels. L'origami est donc un support intéressant, car transversal et producteur d'interdisciplinarité », renchérit le directeur.

Susciter l'intérêt

L'établissement fait donc intervenir, une première fois en octobre 2007, Vincent Floderer, origamiste et cofondateur du centre de recherche international de médiatisation par le pli, pour une séance de démonstration et d'initiation de deux jours destinée à la fois aux jeunes et aux instituteurs.

« Vu l'intérêt suscité à la fois chez les deux publics, nous en avons programmé deux autres, afin que les enseignants s'approprient davantage la technique, et en créant des groupes d'âges et de niveaux pour les jeunes les plus intéressés. »

De fait, certains usagers ont fait preuve d'aptitudes particulières pour confectionner étoiles, boîtes et autres figures de papier coloré. « Dès lors, il nous est apparu intéressant de s'appuyer sur les compétences acquises par les jeunes de l'IME pour construire une intégration pertinente au sein de l'école », explique Alain Chauveau. Qui, accompagné des enseignants de l'IME, a rencontré courant 2007, le directeur de l'école communale, afin d'envisager l'application et la traduction de la loi du 11 février 2005. Objectif: imaginer la création d'activités communes aux deux publics. Les deux structures viennent de se mettre d'accord pour des « cours d'intégration citoyenne ».

Dans un premier temps, pendant cinq semaines, un après-midi par semaine, trois jeunes volontaires de l'IME animeront alternativement des séances d'origami destinées à six élèves de CM1-CM2.

L'origami, un support comme un autre? « Certains enfants ont une bonne mémoire photographique, d'autres sont dans une démarche plus empirique et sont capables de reproduire et de montrer... Mais ce qui est intéressant avec l'origami, c'est ce que ces enfants, qui ne sont pas toujours dans la profondeur des choses, ni dans le volume, peuvent faire dans l'espace à partir d'une feuille de papier », précise Éric Berthomé, psychologue clinicien.

Le plus important selon ce dernier: les jeunes, en difficulté pour certains apprentissages traditionnels, « et réputés déficients mentaux ou intellectuels, stigmatisés d'un point de vue scolaire, peuvent finalement, dans un autre contexte, retourner à l'école. »

Noémie Gilliotte

Contact

0545905403

En chiffres

IME La Liège agréé pour 60 jeunes, de 6 à 20 ans.

Jeunes accueillis en internat: 30

En externat: 30

Effectifs salariés: 37

Budget 2008 : environ 1,9 million d'euros

« Trouver une autre formule »

Marianne Fabrer, enseignante à l'IME

L'institut médico-éducatif a pour mission de réintégrer les enfants dans les classes dites ordinaires. Lorsque c'est possible. Car les jeunes accueillis présentent souvent des troubles du comportement. Avant de pouvoir étudier, ils doivent pouvoir s'apaiser. Et souvent ils n'y parviennent que tard. Nous sommes donc toujours en décalage par rapport au projet d'intégration. On a donc voulu trouver une autre formule, les classes “externées” traditionnelles n'étant pas toujours la meilleure solution. L'idée de l'origami, comme support, nous est venue en les voyant faire: nous avons remarqué que certains avaient beaucoup de capacités. On va donc leur demander d'animer des ateliers à l'école communale. Ce qui leur permettra d'avoir une autre vision de celle-ci, en les inscrivant, de fait, dans la vie sociale et la citoyenneté. Nous en attendons un important travail de restauration de l'estime de soi. »






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