Aurélie Milon, maîtresse de maison au foyer de vie Ty Coat (Adapei Nouelles Côtes d’Armor)
Internats organisés en petites unités de vie, logements partagés… Les maîtresses de maison se sont réellement installées dans le paysage social et médico-social dans les années 2000, avec la promotion d’habitats à taille humaine. Dans la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif (Bass), on en recensait 5 487 à la fin 2016 [1]. Principalement dans les champs du handicap (foyers de vie…) et de la protection de l’enfance (maisons d’enfants à caractère social – Mecs).
La vie quotidienne, support de l'accompagnement
La principale mission de ces professionnelles, des femmes essentiellement ? Assurer aux usagers un cadre de vie sûr et agréable. En général, elles sont responsables des repas et de l’entretien : des locaux, des équipements ou encore du linge. Bien sûr, le contenu de leur poste varie avec l’éventuelle intervention de prestataires extérieurs (en blanchisserie, restauration, nettoyage…). Si la cuisine est internalisée, les activités dévolues à la maîtresse de maison peuvent aller de la gestion des stocks à la préparation des repas, en passant par la composition des menus. « Attention, l’objectif n’est pas de tout faire à la place des résidents. Dès que possible, je les associe à certaines tâches, explique Aurélie Milon, maîtresse de maison au foyer de vie Ty Coat de l’association Adapei Nouelles Côtes d’Armor. Situé à Saint-Brieuc, il accueille 28 personnes avec un handicap mental ou psychique. « C’est à elles de ranger leur linge par exemple, même si je peux les y aider », poursuit-elle. Ainsi, les actes de la vie quotidienne servent de supports à l’accompagnement des usagers vers plus d’autonomie. Ce qui implique d’avoir une bonne idée de leur potentiel et des difficultés qu’ils rencontrent.
Une ambiance familiale
Façonner un cadre de vie accueillant passe aussi par l’instauration d’une atmosphère sereine. Dans les faits, ces professionnelles de terrain peuvent gérer des petits conflits, s’assurer de la participation de chacun à la vie du collectif, encourager le lien social… « J’organise des goûters d’anniversaire. Tous ensemble nous faisons les courses, confectionnons les gâteaux, décorons la salle… », illustre Aurélie Milon. « Nous sommes à la recherche de compétences relationnelles, pour créer une ambiance familiale ; le recrutement est une affaire de feeling avant tout », constate Anne Molet, cheffe de service à l’Union départementale des associations familiales (Udaf) de la Meuse, qui emploie six maîtresses de maison pour 48 places en maison relais dans le département. « Elles font un travail très compliqué, souligne-t-elle. Au quotidien avec les résidents, elles doivent les stimuler et se montrer très attentives en permanence : conseiller à l’un de changer de pantalon, rappeler à l’autre que c’est son tour de vaisselle, prendre le temps d’échanger avec un troisième qui n’a pas l’air bien… »
Rattachées à la convention collective du 15 mars 1966, elles gagnent 1459,20 euros brut par mois (sujétion « internat » incluse) en début de carrière. Elles doivent avoir suivi la formation « Maître.sse de maison qualifié.e » (203 heures) reconnue par la Bass. « L’enjeu principal de ce cursus est de leur faire comprendre qu’elles font partie de l’équipe éducative, explique Pascale Gérard, responsable pédagogique à l’Institut régional du travail social (IRTS) de Lorraine. Elles ont un rôle d’observation et de repérage, doivent faire remonter certaines informations aux éducateurs. Il est important de s’assurer de leur participation à la vie institutionnelle. »
[1] Enquête de l’Observatoire prospectif des métiers et des qualifications et du fonds formation Unifaf 2017.
Aurélia Descamps
Point de vue
Natacha Dutertre, maîtresse de maison à la Maison d'enfants de Guizelin, à Hardinghen (Pas-de-Calais), gérée par l’association Temps de vie
« Je travaille dans une unité de vie qui réunit 15 enfants de 7 à 17 ans. Mon rôle est de la garder propre, accueillante et de m’occuper des repas. À la différence des éducateurs dont les horaires varient, je suis présente tous les matins dès le petit-déjeuner, jusqu’à 14 h 45. Pour les enfants, je suis un point de repère. Ils savent qu’ils peuvent venir me voir dans la cuisine ou dans la lingerie pour s’isoler du groupe, faire leurs devoirs à mes côtés, se confier… Ce sont des moments de partage que j’apprécie particulièrement. Quand certains ont besoin de parler mais n’osent pas le faire, je dois y être attentive et aller vers eux. S’ils me révèlent des choses importantes sur le plan éducatif, j’en fait part aux éducateurs. Chaque mois, je participe à une réunion de service. J’anime aussi ponctuellement des groupes d’expression d’enfants ; j’ai suivi une formation sur le sujet. Nous sommes au cœur du projet d’établissement. »
Publié dans le magazine Direction[s] N° 182 - janvier 2020