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Maisons de l'autonomie
Quel guichet unique ?

22/01/2014

La loi sur l’adaptation de la société au vieillissement ouvrira-t-elle la porte à la généralisation des maisons de l’autonomie ? Un dispositif dont les possibles modalités de mise en œuvre divisent les acteurs.

« Condition de la réussite collective » du futur projet de loi Autonomie aux dires du gouvernement, l’amélioration de la gouvernance au niveau local pourrait passer par l’instauration de guichets uniques dans le cadre de l'accompagnement des personnes âgées, en butte à la complexité des dispositifs. Parmi les options débattues ? La généralisation des maisons de l’autonomie (MDA), emblème tout trouvé du consensuel principe de convergence des politiques en faveur des personnes âgées en situation de dépendance et handicapées, prôné par le législateur en 2005. Un scénario que le monde du handicap envisage aujourd’hui avec une certaine circonspection. Voire, pour certains, avec une franche réticence.

MDA départementalisée

Une MDA, oui, mais laquelle ? Pour l’Assemblée des départements de France (ADF), pas question d’une création ex nihilo : intégré aux services des conseils généraux, le dispositif doit être élaboré à partir des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), au périmètre étendu. Inacceptable pour Malika Boubekeur, conseillère nationale compensation et autonomie à l’Association des paralysés de France (APF). « Ce que propose l’ADF n’est rien de moins que la fin du groupement d'intérêt public [GIP], c'est-à-dire la mise à l’écart des services déconcentrés de l’État, mais également des représentants des usagers, qui siègent à la commission exécutive [Comex] et à celle des droits et de l'autonomie des personnes handicapées [CDAPH]. La disparition de ce statut, innovation majeure de la loi de 2005, serait un intolérable retour en arrière. »« L’ADF n’est pas frileuse sur la question de la cogouvernance, réfute Luc Broussy, conseiller général PS, animateur en 2013 d'une « mission ADF » sur le sujet. Aux côtés de ces MDA, des commissions départementales de solidarité pour l’autonomie associant les deux instances consultatives pour les personnes âgées et handicapées, le CDCPH et le Coderpa, avec la Comex, pourraient, sous la houlette du président du conseil général, être dotées de réels pouvoirs, notamment celui de donner leur avis sur le budget. »

Un possible casus belli, bien compris par le conseil général de la Corrèze dès la mise en place de sa propre MDA en 2009. « Les associations craignent de perdre la pluridisciplinarité institutionnelle et le principe de la représentation de l’usager, comprend Nathalie Marrien, directrice de l’autonomie. Ici, nous avons décidé d’aller jusqu’au bout de la logique du GIP en matière de gouvernance : aux trois collèges existants (élus départementaux, institutionnels et associations), un quatrième constitué des représentants du secteur des personnes âgées a été ajouté. Ensemble, ils forment le conseil d’organisation stratégique, organe de gouvernance des politiques de soutien à l’autonomie qui, faute de statut juridique, fonctionne aux côtés du GIP de la MDPH. »  

Pour l’union nationale interfédérale Uniopss, le scénario proposé a comme un air de déjà-vu. « Sortie par la porte de la décentralisation, la départementalisation des MDPH est aujourd’hui en passe de revenir par la fenêtre de l’autonomie, ironise Alain Villez, conseiller technique. Si elle a lieu à législation constante, ces MDA seront certes des lieux ressources, mais pourquoi faire en l’absence de perspective sur un droit universel à compensation pour l’autonomie ? »« Il n’est question ici que d’un rapprochement purement organisationnel, reprend à son tour Malika Boubekeur. Nous ne sommes pas contre la convergence, mais là, en l’absence d’abaissement de la barrière d’âge et de budget spécifique, on reste avec des prestations, des publics et des possibilités de réponses bien distinctes. »

Rapprochement limité

Mutualiser, mais jusqu’au où ? Accueil, orientation, évaluation, suivi des plans d’aide… Sur le terrain, les conseils généraux sont passés des paroles aux actes, selon des modalités à la carte. Dans le Cantal, le dispostif, absorbé par la collectivité, se décline en trois MDA réparties sur le territoire et est adossé aux deux centres locaux d'information et de coordination (Clic) existants. « Nous avons cherché à mettre en œuvre l’idée de convergence en lien avec les besoins et les spécificités de notre département (grande superficie, faible densité, peu de moyens financiers, faible maillage territorial préexistant…), énumère Daniel Bouzat, directeur adjoint du pôle Solidarité départementale au conseil général. À propos de la mutualisation, nous sommes très transparents sur ce qui relève, ou pas, des deux publics : nous avons une base commune, notamment en ce qui concerne l’accueil. Et progressivement, plus on entre dans le détail du traitement de la demande, plus le relais est pris par des spécialistes de chacun des champs, notamment en matière administrative et d'évaluation. »« Il y a sans aucun doute des synergies à trouver, sur l’accessibilité et l’adaptation des logements par exemple, reconnaît le secrétaire général de l’association des accidentés de la vie (Fnath), Arnaud de Broca. Mais pas sur tous les sujets, car les problématiques sont différentes en matière d’emploi ou de projet de vie par exemple. »

Précisément, les opposants ont trouvé, du côté du Comité national des retraités et personnes âgées (CNRPA), un allié pour le moins inattendu : « La mise en place de lieux mutualisés peut certes apporter des solutions aux complexités actuelles auxquelles sont confrontées les personnes âgées, mais ne doivent pas conduire à remettre en cause les dispositifs existants pour les personnes handicapées, prévient Sylvain Denis, son vice-président. Les MDA doivent donc constituer des sorties vers le haut et non une occasion de dégrader l'existant. »

Vers un droit d’option ?

Dans ce contexte, seul le gouvernement pourrait être en mesure de siffler la fin de la partie. Dans le cadre des concertations sur le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, le groupe de travail consacré à la gouvernance a pris, sous la houlette de Paulette Guinchard-Kunstler, présidente du conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), le relais de celui, piloté en 2013 par l’ADF. Dès la première séance, il a sans doute mesuré la force des antagonismes et vu son ordre du jour bousculer par les représentants des départements décidés à entrer dans le vif du sujet sans attendre. Possibilité évoquée, l'inscription dans la loi d'un droit d’option pour les collectivités, permettra-t-elle de détendre les crispations ? Peu de chances. « C'est la pire des options », balaie la Fnath attachée à l’homogénéité de l’actuel dispostif MDPH. « Ces lieux pourraient être au cœur des politiques locales d’autonomie de demain, plaide Luc Broussy. Battre en retraite sur le sujet signerait l’échec de cette réforme pourtant indispensable. »  Le compte à rebours est lancé pour le gouvernement, qui doit boucler les discussions en février. L’avis défavorable émis le 21 janvier dernier par le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) sur le « scénario ADF » ne devrait en tous cas pas lui faciliter la tâche.

Gladys Lepasteur

Point de vue

Bernadette Moreau, directrice de la compensation de la perte d’autonomie, à la CNSA

« Chantier très structurant, l’installation d’une MDA nécessite pour les collectivités de bien définir leur approche en amont. Est-il seulement question de rapprocher les équipes ou d’aller jusqu’à leur fusion ? Leurs interrogations doivent également porter sur la méthode (quels outils mettre en commun ?) et sur le degré de convergence. Entre 2009 et 2012, la CNSA a soutenu, notamment financièrement (170 000 à 230 000 euros), trois projets menés par les conseils généraux du Cantal, de Corrèze et de Côte-d’Or. Chacun a opté pour l’approfondissement d’axes de travail particuliers, en fonction de la réalité de leur territoire (mutualisation de l’accueil, de l’évaluation…). La polyvalence a toutefois des limites : complète, elle ne pourrait qu’être réductrice, car chaque champ comporte des spécificités propres. »

Repères

  • « Dans un délai maximum de cinq ans, les dispositions opérant une distinction entre les personnes handicapées, en fonction de critères d’âge en matière de compensation du handicap […] seront supprimées. » (art. 13 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005)
  • 37 départements avaient mutualisé les fonctions d’accueil et d’orientation en 2011.
  • « À terme, la prise en compte du handicap pourrait être noyée dans le futur dispositif, au profit de l’accompagnement des personnes âgées, plus nombreuses. » (Arnaud de Broca, secrétaire général de la Fnath)

Publié dans le magazine Direction[s] N° 117 - février 2014






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